Le projet PRODYNOV s’inscrit dans une thématique d’étude visant au développement des stratégies de photodiagnostic et de thérapie photodynamique des lésions péritonéales. L’objectif de notre équipe multidisciplinaire est de réunir les conditions nécessaires au développement d’un traitement photodynamique applicable en clinique humaine pour le traitement des carcinoses péritonéales d’origine ovarienne.
Cette démarche impose l’amélioration des techniques de modélisation de la cavité péritonéale, le développement de procédés d’illumination adaptés à ses contraintes, et l’utilisation de photosensibilisateurs de nouvelle génération ciblant les lésions de carcinose avec une meilleure spécificité pour améliorer la tolérance du traitement.
Contexte et enjeux
Le cancer de l’ovaire concerne 4 500 nouveaux cas chaque année en France. Le mauvais pronostic de la maladie est lié au retard diagnostic puisque la majorité des cas sont diagnostiqués aux stades III et IV de la Fédération Internationale de Gynécologie Obstétrique (FIGO). Ces stades sont marqués par l’existence de métastases péritonéales dont le traitement représente un enjeu pour le chirurgien car le taux de récidive locale est élevé et directement lié à la qualité de l’exérèse chirurgicale.
La prise en charge actuelle associe lorsqu’elle est possible, une chirurgie à une chimiothérapie reposant sur l’utilisation de sels de platine. Certaines thérapies ciblées sont venues récemment compléter cet arsenal thérapeutique. Il est admis que l’absence de lésions résiduelles après la chirurgie est le facteur principal de bon pronostic. La capacité du traitement chirurgical à éradiquer l’ensemble des implants tumoraux est donc décisive.
L’existence de lésions péritonéales microscopiques et la fréquence des récidives péritonéales imposent le développement de stratégies complémentaires.
La thérapie photodynamique est une option intéressante car elle est adaptée au traitement de surface étendue. Elle peut être associée à un photodiagnostic et une chirurgie guidée par la fluorescence.
Nous souhaitons développer une technique alternative déjà appliquée dans d’autres disciplines, en proposant le photodiagnostic et la thérapie photodynamique des lésions de carcinose péritonéale ovarienne. Nous sommes convaincus que la réalisation d’une séance de thérapie photodynamique en complément d’une chirurgie de cytoréduction complète permettrait la destruction des lésions microscopiques et la diminution du taux de récidive péritonéale.
Thérapie photodynamique
La thérapie photodynamique (PDT) est une stratégie alternative qui présente plusieurs avantages : traitement de surface, ciblage spécifique des cellules tumorales, possibilité d’être associée à d’autres traitements, faible coût potentiel. La réaction photodynamique repose sur l’activation d’un photosensibilisateur par une lumière de longueur d’onde spécifique qui conduit, en présence d’oxygène, à la production d’espèces réactives de l’oxygène cytotoxiques.
Il a ainsi été montré par notre équipe qu’il était possible d’induire efficacement une nécrose des microlésions péritonéales par la mise en œuvre d’un protocole de PDT sur lignée cellulaire in vitro et sur un modèle animal in vivo.
De nombreux facteurs peuvent influer sur la sécurité et les résultats de la PDT : choix du photosensibilisateur et spécificité de ce dernier pour le tissu cible, puissance totale délivrée et vitesse d’administration (irradiance), longueur d’onde d’excitation, intervalle entre l’injection du PS et l’application de la lumière. Le traitement de l’ensemble de la cavité abdominale nécessite aussi la mise au point d’une nouvelle procédure d’illumination. De récents travaux de notre équipe sur modèle animal ont pu montrer que des illuminateurs souples permettaient d’assurer une illumination homogène.
Dans le cadre de travaux collaboratifs, des textiles lumineux de grandes dimensions, parfaitement adaptés à l’illumination de la cavité péritonéale, ont pu être conçus.
Perspectives
La fréquence des récidives péritonéales après traitement fait discuter les limites de la chirurgie de cytoréduction, qui ne permettra pas le contrôle de la maladie microscopique, et la problématique des chimiorésistances.
En offrant la possibilité de traiter localement des lésions disséminées sur une large surface, la PDT apparaît théoriquement comme un candidat pertinent pour le traitement des carcinoses péritonéales d’origine ovarienne.
Le cancer de l’ovaire doit être considéré comme un ensemble de sous-groupes de maladies distinctes. La PDT doit répondre à cette exigence scientifique de personnalisation des traitements. L’essor des thérapies ciblées et la découverte de cibles moléculaires spécifiques, à l’image du récepteur au folate, peuvent contribuer à envisager une application clinique de la PDT intrapéritonéale. Un photosensibilisateur plus spécifique devrait en effet permettre d’améliorer la tolérance de la procédure, de limiter le nombre des complications, et ainsi de donner une place à la PDT intrapéritonéale dans l’arsenal thérapeutique disponible aujourd’hui. L’équipe du Laboratoire Réactions et Génie des Procédés (UMR 7274 CNRS - Université de Lorraine, Nancy, France) apporte son expertise pour le design et la synthèse de photosensibilisateurs adaptés.
Nous étudions par ailleurs en collaboration avec l’équipe CNRS UMR 8161 (Institut de Biologie de Lille, France) les spécificités de la réponse immune anticancéreuse après PDT. Cet aspect du traitement est un axe de recherche à part entière dans la mesure où associé à la toxicité directe liée au traitement, il pourrait exister un effet abscopal contribuant à conférer un rôle protecteur au traitement. Il a été démontré que la PDT pouvait modifier le sécrétome des cellules tumorales entraînant l’activation du métabolisme mitochondrial des cellules immunitaires.
Plusieurs paramètres sont impliqués pour la mise en œuvre du traitement (photosensibilisateurs, source lumineuse, dosimétrie, biologie). Il est donc essentiel d’avoir une réflexion globale pour développer ces différentes composantes afin de proposer un protocole efficace, simple et reproductible pour les cliniciens. Notre équipe multidisciplinaire réunit ces différents acteurs et dispose des conditions requises pour atteindre cet objectif.